L'envie s'est installée depuis quelques jours, devenant de plus en plus forte, jusqu'à devenir une nécessité : il me faut aller en forêt. C'est la première année que la simple idée de ce plaisir se transforme autant en besoin. D'autant plus que les années passées, je n'y ai même pas pensé.
C'est l'automne. Un automne clément cette année. Les températures sont très douces mais les pluies sont quand même là. Je suis certaine que la forêt est pleine de champignons.
Mais aller en forêt en famille n'est pas si simple : déjà, il y a Agathe qui ne pourrait pas marcher et qu'il va falloir porter tout le temps, c'est-à-dire le temps limité où elle voudra bien rester dans le dos de quelqu'un.
Ensuite, il y a un autre point non négligeable : j'ai peur de me perdre et de ne pas retrouver par où je suis passée. Dans une forêt, surtout quand on n'y va pas souvent, on a vite fait de tourner sur nous même et de ne plus savoir dans quel sens aller.
Et enfin, je sais qu'il faut être attentif et patient lorsque l'on cherche des champignons. Je sais aussi qu'il peut être décevant de ne rien trouver. Et si moi, j'ai été habituée depuis toute petite à suivre mon père dans la forêt sans rien dire et à aimer y passer une journée complète même si je ne trouve rien, ce n'est le cas ni de mes enfants, ni de Jean-François qu'il va falloir motiver et pousser un peu.
Pierre et Victoria n'étant pas là, nous avons décidé de tenter l'aventure avec Paul, Louis et Agathe dans le dos. C'est dans la forêt de Rambouillet que je voudrais aller car je pense reconnaître certains endroits. Jean-François balaie vite l'idée de se perdre. Pour lui, avec la géolocalisation et les coordonnées GPS de l'endroit où on laisse la voiture, aucun problème pour revenir d'où nous sommes partis. Et de fait, une fois dans la forêt, je constate que nous avons quand même du réseau et que nous saurons rentrer.
Il ne reste donc plus qu'à regarder autour de nous. Profiter de cette belle nature. La regarder, l'écouter, la respirer. Moi qui suis venue ici chaque automne pendant 15 ans avec mon père, je me demande comment l'appel ne s'est pas fait entendre les années passées. C'est lorsque Victoria avait 4 ans, que je suis venue la dernière fois. Une question de disponibilité et de priorité sûrement.
Très vite, au bout de quelques dizaines de pas, je repère avec une certaine excitation les premiers cèpes. Soulagement ! Je sais que si j'en ai trouvés si vite, il y en aura d'autres. J'appelle tout le monde. Paul et Louis découvrent à quoi ressemble un cèpe et j'explique. J'explique comment les voir, les petites astuces pour trouver ceux qui se cachent, comment ils poussent, comment les voir malgré les feuilles souvent trompeuses, les endroits où on risque d'en trouver et les endroits où ils ne poussent pas, comment les sortir de terre et les manipuler...
J'aurais pu y passer la journée. La forêt s'est montrée sous son jour le plus merveilleux : nous avons pu voir des dizaines d'espèces différentes de champignons, les fascinantes amanites tue-mouches, ceux qui s'accrochent aux souches, ceux qui ont des lamelles, des colerettes, ceux qui n'ont pas la forme d'un champignon tel qu'on l'imagine et même le terrible bolet de Satan que les enfants ont pu voir noircir et révéler ainsi son vrai visage.... mais aussi les beaux scarabés à la carapace presque métalisée qui reflète la lumière, les fougères et leurs spores oranges, les mousses, les glands, chataîgnes et autres fruits. J'ai répondu aux nombreuses questions mais quelle frustration de parfois ne pas savoir.
J'aurais pu y passer la journée, ne pas manger, ne rentrer qu'à la nuit tombée avec le bonheur et la fatigue d'une journée parfaite...
C'est certain, je ne vais pas en rester là... d'autant plus que Victoria et Pierre n'ont pas pu partager ce moment avec nous.
Et voilà notre récolte du jour.